Nathalie Palayret
La bibliothérapie en pratique : Ce qui germe en secret

D'abord, un texte à lire lentement, tranquillement. Le mieux, c'est encore de lire à voix haute, même si on croit qu'on ne lit pas bien. On lit, on relit encore.
D'abord on veut comprendre le sens puis on devient sensible au rythme et à la poésie du texte.
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Toutes les années nous disons que la nature se couche pour son sommeil d'hiver ; mais nous n'avons jamais observé ce sommeil de près, ou, pour mieux dire, nous ne l'avons pas encore observé de dessous. Renversons les choses sens dessus dessous, pour les observer mieux ; mettons la nature à l'envers pour la mieux voir, mettons-la racines en l'air. Mon Dieu, on appelle ça un sommeil ? C'est ça que vous appelez du repos ? On pourrait dire que la végétation a cessé de croître à la surface parce qu'elle n'en a pas le temps ; car elle a retroussé ses manches pour croître par en bas ; elle s'est craché dans les mains et elle creuse dans la terre. Regardez cette chose claire dans la terre, ce sont de nouvelles racines ; regardez jusqu'où elles atteignent, allez, allez. N'entendez-vous pas la terre frapper avec cette violence engagée et massive ?
Et là, ces choses blanches, tendres et grosses, ce sont de nouveaux germes et de nouvelles pousses. Regardez comme il y en a. Comme tu t'es étoffée, immortelle fanée et desséchée ; comme tu te portes bien, comme tu regorges de vie. Et c'est ça que vous appelez un sommeil ? Le diable emporte feuilles et fleurs. Quelles blagues ! C'est en bas, sous la terre, que se fait le véritable travail ; c'est ici, ici, ici que poussent les nouvelles tiges ; c'est d'ici à là, du premier au dernier jour de novembre, que jaillit la vie qui apparaîtra en mars ; c'est ici, sous la terre, que se dessine l'immense programme du printemps.
Nous ne voyons pas les germes parce qu'ils sont sous la terre ; nous ne connaissons pas l'avenir parce qu'il est en nous. Parfois il nous semble que nous sentons la pourriture, encombrés que nous sommes de vestiges desséchés du passé ; mais si nous pouvions voir tous les rejets gros et blancs qui se frayent un chemin à travers cette vieille terre de civilisation qui s'appelle "aujourd'hui", toutes les graines qui germent en secret, tous les vieux plants qui se ramassent et se rassemblent pour former un germe vivant, qui un jour éclatera pour former une fleur vivante, si nous pouvions voir ce fourmillement caché de l'avenir au milieu de nous, il est sûr que nous dirions que notre mélancolie et notre scepticisme sont de grandes sottises et que le meilleur de tout, c'est d'être un homme vivant, je veux dire un homme qui croît.
Extrait de "L'année du jardinier" de Karel Capek, traduction de Joseph Gagnaire
A vous maintenant de penser à tout ce qui "germe en secret" : dans votre jardin, dans la nature mais aussi en vous bien sûr !
Vous pourrez en dresser une liste ou bien écrire un court texte où vous décrirez tout ce qui germe en vous à la manière d'un jardinier qui observe ce qui se passe dans son jardin .